Ilia Zdanévitch est né en 1894, à Tiflis (qui deviendra Tbilissi) en Géorgie. Très jeune, avec son frère Kirill et son ami le peintre Mikhaïl Le Dentu, il découvre celui qui deviendra, grâce à lui, le peintre national de la Géorgie, Niko Pirosmani. Arrivé à Pétersbourg au début des années 1910, il adhère aux cercles les plus radicaux du futurisme russe et il écrit, entre 1916 et 1922 un cycle de cinq pièces composées comme des partitions d’orchestre dans une langue transmentale (le zaoum) qu’il intitule Aslaablitchié (Létrélane). Il est le premier à écrire sur Mikhaïl Larionov et Natalia Gontcharova et promeut la doctrine du vsiotchestvo, ou omnitude, qui consiste à ne pas considérer le temps comme une durée mais un espace contemporain sans cesse réinventé dans lequel l’artiste est libre de choisir ses références ou ses interlocuteurs.
Correspondant sur le front du Caucase pendant la Première Guerre Mondiale et témoin de son horreur, il se passionne pour l’architecture des églises géorgiennes et arméniennes qu’il découvre sur le territoire de la Turquie (il restera un spécialiste mondialement reconnu de ces églises). Il quitte la Géorgie en 1920 et s’installe à Paris où il participe à la vie bouillonnante de l’avant-garde et se lie avec des poètes et des peintres qui resteront ses amis, comme Picasso ou Eluard (il prend alors le pseudonyme d’Iliazd). Les querelles entre les dadaïstes et les surréalistes le laissent pourtant profondément amer et, au cours des années 20 et 30, il se retire de la vie littéraire. Il s’engage chez Coco Chanel, dirige une de ses usines, puis démissionne au moment de la crise de 1929. Il écrit des romans, dont un seul, Le Ravissement, sera publié (mais le tirage lui reste sur les bras).
En 1936-37, il veut s’engager dans les Brigades internationales, mais il est refusé, comme soutien de famille. Isolé, il revient à la poésie et se met à écrire des sonnets, qu’il publie, à très peu d’exemplaires, avec des gravures de ses amis peintres (Pablo Picasso pour Afat en 1940, Survage pour Rahel en 1941, Picasso encore pour La Lettre — une suite de quatrains —, Giacometti et Braque pour Sentence sans parole).
Afat sera suivi jusqu’à son décès en 1975 par la publication d’une série de livres d’artistes dont la beauté fera de lui l’un des deux ou trois grands éditeurs du siècle.
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